vendredi 23 décembre 2011

Le devoir de client: un exemple.

On rappelle souvent que le fournisseur a des obligations, notamment de conseil, à l'égard de son client. Mais le client a lui aussi des obligations d'information vis-à-vis de son fournisseur, et notamment quand la prestation ne répond pas à ses attentes. Sinon le client peut se retrouver responsable des difficultés qu'auront créées les insuffisances de son fournisseur.

Une entreprise m'expose ses griefs à l'égard de son fournisseur de système d'information. Ce dernier héberge et exploite une solution informatique métier, élément clé pour l'activité de l'entreprise. Il a provoqué des problèmes objectivement graves, par exemple des interruptions intempestives de services, des données  perdues, des opérations mal exécutées par exemple des prélèvements automatiques en double. Il ne prend en compte les demandes de correction fonctionnelle ni les besoins d'évolution de son client.

Ayant entendu la longue litanie des plaintes, je pose une simple question: "Votre fournisseur ne vous donne pas satisfaction. Le lui avez-vous dit ?" Et là, ô surprise, "Non, cela ne sert à rien, il ne nous écoute pas..."

Or l'examen des contrats démontre que ceux-ci sont bien écrits, que les obligations respectives sont claires. Le métier du client et ses enjeux sont suffisamment décrits. Le contrat prévoit que le fournisseur fait son affaire des moyens à mobiliser pour exécuter les prestations prévues. Un comité de pilotage est programmé tous les deux à trois mois pour faire le point sur les prestations. 

Et je finis par comprendre que ce comité de pilotage ne s'est pas réuni depuis plus de six mois. De plus, le client a imposé que son fournisseur prenne comme sous-traitant un ancien collaborateur, qui connaît bien la solution. Par ailleurs, le client ne traite pas certaines des factures de son fournisseur, pas même pour expliquer que ces factures sont inacceptables et doivent être annulées.

Certes, la mauvaise qualité des prestations met en danger l'existence même de l'entreprise. Mais à supposer que cette dernière constate des dommages voire doive cesser son activité, elle ne pourrait pas prétendre à une indemnité de la part de son fournisseur, malgré les torts objectifs de ce dernier. En effet, en négligeant le fonctionnement du comité de pilotage, l'entreprise a failli à son devoir de client . Elle ne donne aucune suite à des factures. Elle intervient dans l'organisation des moyens de son fournisseurs, ce que le contrat proscrit.

Cette situation paraît incroyable, elle n'est à mon avis pas si rare. Pour en sortir, on se fonde sur un constat partagé des insuffisances, puis sur un choix concerté des priorités. Le prestataire s'engage sur la base des priorités qu'exprime son client, le client pilote et contrôle les engagements du prestataire. La charge de responsabilité retourne sur les épaules du prestataire. Le client a retrouvé le chemin de son devoir tactique, qui concerne l'activité de pilotage de son fournisseur. Il reprend les rênes sur son devoir de stratège, en redéfinissant sa stratégie de sourcing, et en préparant une nouvelle contractualisation. Le chemin est long, il est coûteux, mais il permet la réduction du risque, et la survie de l'entreprise.

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