vendredi 15 février 2019

Idéologie centrale contre pragmatisme local

Sous des prétextes pratiques mais avec des mobiles idéologiques, les députés ont décidé de gommer par la loi la notion de paternité et maternité dans les formulaires scolaires. Encore maintenant, le débat sur l'évolution du modèle familial est pollué par des questions idéologiques. Au détriment des enfants et de la paix sociale.

Les députés ont adopté le 12 février 2019 l'amendement 834 à la loi Pour une école de la confiance. Cet amendement vise à remplacer les mentions de père et de mère par celles de parent 1 et 2 dans les formulaires administratifs de l'école. Je cite la motivation: Afin d'envoyer un signal de respect aux familles homoparentales et dans un souci de faire évoluer les formulaires administratifs aussi vite que la société, cet amendement propose que chaque formulaire administratif d’informations soumis aux parents fasse désormais la mention d’un « parent 1 » et d’un « parent 2 », à la place des mentions « père » et « mère ».

Il est bien naturel que cet amendement soulève un tollé. Cela fait bien longtemps que les responsables d'école, ceux qui sont réellement sur le terrain au lieu d'être pénétrés d'une idéologie prétendant réécrire la science, ont proposé des formulaires qui ne remplacent nullement le père ou la mère, mais permettent aux familles de décrire précisément leur relation avec l'enfant qu'ils confient à l'école. Le foyer de référence comprend-il un ou deux membres ? L'enfant habite-t-il alternativement chez ses deux parents séparés? Le conjoint du parent de référence est-il lui aussi parent de l'enfant ? Chacun des membres du foyer est-il mère, ou père, beau-père, belle-mère, autre ? Ainsi formulées, les questions rendent parfaitement compte de la diversité des familles sans les choquer, et par ailleurs permettent aux enseignants d'appréhender aisément la situation précise de chaque enfant.

Ici, l'idéologie à l'oeuvre consiste à gommer le modèle du père prouvant sa paternité sur un enfant du simple fait qu'il est l'époux de sa mère. Le signal, confirmé par les invectives proférées lors de la discussion du texte, c'est que le modèle hétéroparental est "arriéré" (terme employé dans les discussions de l'assemblée). 

Comme évidemment les tenants de l'idéologie de l'enfant-objet, auquel ont censément droit les ménages homosexuels, ne peuvent infirmer le fait scientifique qu'un enfant est toujours le résultat de l'union d'un gamète d'homme avec celui d'une femme, ils remplacent les arguments sur l'utilité de cette mesure par l'invective à l'endroit de leurs opposants. 

En second lieu, on nous dit que la mention de père et mère "peut également être source d’interrogations de la part de l’enfant [de ménage homosexuel] qui ne comprendrait pas que l’on remette en cause son modèle familial". Je voudrais savoir combien de parents se donnent la peine d'expliquer les formulaires administratifs à leurs enfants. Et supposons qu'ils le fassent: que diront donc à leur progéniture les parents qui, tels des arriérés, élèvent ensemble les enfants issus de leur mariage ? Que leur propre modèle est en voie de désuétude ? Qu'ils sont marginaux ? Est-ce le bien de ces enfants que l'on cherche ? Est-ce la tolérance que l'on promeut ?

Les députés, sous prétexte de faire plaisir à certains lobbies, seraient bien avisés de ne pas apporter trop de signaux de défiance à une école qui s'en passerait volontiers, mais d'apporter la paix par la constatation des faits objectifs dont ont réellement besoin les enseignants. Avec ce geste, ils s'entêtent dans la posture que les Français ne supportent plus de la part du pouvoir central: venir de Paris s'occuper avec incompétence de questions qui se résolvent beaucoup mieux au niveau local.

Le résultat à attendre est justement celui que veulent éviter les promoteurs de la mesure. En premier lieu on nous explique que les ménages homosexuels ne devraient pas se donner la peine de barrer les mentions "père" et "mère". Mais si ces mentions doivent disparaître, ce sont les couples hétérosexuels, mariés ou non, qui barreront "parent 1", "parent 2", pour indiquer la vérité, c'est-à-dire "père", "mère", "conjoint de la mère" ou "du père". A moins que le responsable d'établissement ne fasse fi de la loi et ne propose un formulaire semblable à celui-ci. Je le tiens d'un responsable local d'établissements publics. Il l'utilise depuis dix ans et n'a pas l'intention d'en changer.

Il faudra encore compter sur le Sénat pour, espérons-le, supprimer ce texte ou au moins en annuler les effets. 

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