vendredi 19 février 2021

Passeport vaccinal: contribution au CESE

 

Le conseil économique, social et environnemental sollicite l'avis des internautes sur le passeport vaccinal. Je pense que ce n'est pas ainsi que l'on reviendra à une situation de vie normale. 

Comme je l'ai déjà indiqué notamment sur ce blog, cette mesure exclut a priori les personnes immunisées, Elle exclut également les personnes qui ne craignent pas une contamination, Elle méconnaît le principe d'égalité.

Chaque citoyen peut intervenir jusqu'au 7 mars à propos de cette mesure sur le site du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE).

Voici mon intervention.

Quelques constats

  1. L'immunité à la Covid-19 ne s'acquiert pas uniquement par vaccination. Les personnes ayant subi un épisode infectieux modéré produisent des anticorps qui les protègent au moins aussi bien que tout vaccin, et probablement mieux: d'une manière plus profonde, et aussi plus efficace contre les nouveaux variants pour les patients qui les ont subis.
  2. Cette immunité protège mieux que les vaccins. On parle d'un taux de protection de 95% pour les vaccins. Mais le nombre de morts après une deuxième infection serait de quelques dizaines dans le monde, pour 2,4 millions de décès attribués à la Covid-19.
  3. Ouvrir des droits particuliers aux personnes vaccinées, excluant les personnes naturellement immunisées, méconnaîtrait donc le principe d'égalité à situation comparable. Un simple recours auprès des juridictions administratives permettrait à des personnes naturellement immunisées d'obtenir les mêmes droits que les personnes vaccinées.
  4. L'immunité vaccinale ou naturelle ne garantit pas l'innocuité. Une personne immunisée même par vaccin peut être réinfectée, presque toujours de manière peu symptomatique, et peut être contaminante pendant quelques heures voire quelques jours (cette question est aujourd'hui mal connue) sans s'en rendre compte. La probabilité de contamination, et la durée pendant laquelle la contamination est possible, sont certainement plus faibles qu'avec une primo-infection. Mais une personne fragile peut ainsi être infectée, au péril de sa vie.

Analyse

  1. Le risque à circonscrire n'est pas en premier lieu la contamination. Des dizaines de milliers de personnes sont contaminées chaque année par la grippe, plusieurs centaines en meurent, sans que cela ne soit reproché au gouvernement. Aujourd'hui, contrairement à d'autres pays, l'Europe n'engage pas une stratégie "zéro Covid", mais cherche à protéger les plus fragiles et à ne pas engorger le système de soins.
  2. Le point clé est de protéger les personnes fragiles, susceptibles de ne pas recouvrer d'un épisode infectieux ou d'en garder des séquelles irréversibles.
  3. On notera que les personnes fragiles sont caractérisées par une capacité plus faible de leur système immunitaire à réagir de manière adéquate à l'infection, notamment à la primo-infection. Pour elle, la vaccination ne constitue par une protection absolue.
  4. Eu égard à la capacité de transmission du virus, doivent être considérées comme fragiles les personnes en contact avec des personnes ayant des contacts fréquents avec les personnes fragiles: les personnels de soins, les personnes accompagnant les personnes fragiles.
  5. La politique de "foyers", consistant à limiter les contacts de chacun à un petit nombre de personnes identifiées, comme il est fait dans le milieu scolaire (groupement par classe y compris les récréations, les repas...), a démontré que l'on peut limiter l'effet de contaminations toujours possibles.

Propositions :

  1. La situation immunitaire (pas seulement vaccinale) peut être attestée par un carnet de santé, ou mieux par une utilisation adéquate du DMP, sur lequel le processus de vaccination peut être noté et attesté: dates des injections, type de vaccins, personne attestant l'injection. L'acquisition d'immunité naturelle peut être attestée par le résultat d'un test sérologique, lui aussi daté.
  2. Une personne non immunisée peut être dans un état sanitaire lui permettant d'anticiper sereinement une possible infection. Sur sa demande, un médecin peut lui proposer un certificat semblable aux autorisations de pratique de sport. Un tel certificat ne garantit pas que le patient se sortira d'une éventuelle infection, mais atteste que le risque de complication, pour lui ou éventuellement pour son entourage, est faible au regard de son état de santé. Un tel certificat peut être inséré au DMP.
  3. A contrario, une personne en état de fragilité sanitaire peut obtenir un certificat en ce sens, prescrivant des précautions et des protections. De tels certificats sont déjà couramment prescrits à des personnes présentant des fragilités spécifiques (exemple: fragilités alimentaires, fragilité des tympans excluant la plongée et l'exposition aux bruits intenses etc.).
  4. Toute personne peut aujourd'hui demander un test de présence de virus (PCR ou antigénique). Un test négatif démontre, avec une probabilité élevée, que la personne n'est pas contaminante pendant quelques jours après le test.
  5. L'état sanitaire découlant de tels certificats peut être rendu accessible via les moyens numériques, sans révéler le détail de la situation de santé du patient. L'état sanitaire est réputé valable pendant une période limitée dans le temps.
  6. L'accès à des activités sociales ordinaires (spectacles, musées, restaurants) pourrait être réservé à des personnes présentant un état sanitaire adéquat: preuve d'immunité (naturelle ou vaccinale), preuve de non-innocuité (absence de virus dans un test récent), voire attestation de faible fragilité. L'objectif est de limiter le risque d'un tel événement social sur le nombre de cas graves.
  7. Le contact avec des personnes fragiles pourrait être subordonné à un état sanitaire plus restreint. L'immunisation naturelle ou vaccinale peut à bon droit être exigée de professionnels effectuant des soins rapprochés. Le test PCR ou antigénique négatif récent serait exigé des autres personnes. Des recommandations seraient faites en ce qui concerne les contacts privés. Notez que les familles font aujourd'hui beaucoup d'efforts pour protéger les plus anciens, notamment en se testant avant de les visiter.
  8. Le CESE peut recommander aux entreprises et lieux de travail de cloisonner au maximum les groupes d'activité, de manière à limiter la taille d'un éventuel foyer épidémique qui naîtrait en leur sein.

Conclusion

La mise en oeuvre d'un passeport exclusivement vaccinal sera immanquablement contestée, car ce dispositif serait une limitation de liberté qui ne s'appuierait pas sur des critères objectifs.

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