lundi 27 juin 2022

Les mauvais débats du gouvernement des symboles


La guerre d'Ukraine fait flamber les prix et menace notre sécurité énergétique. Les personnels de santé publique restent en nombre insuffisants, alors que s'imposent les signes d'une explosion prochaine de nouveaux variants de la Covid-19, sans que les autres difficultés sanitaires n'aient été résolues. Le nombre de candidats aux postes d'enseignement secondaire est trois fois inférieur au nombre de postes à pourvoir. Ne parlons même pas de l'urgence climatique qui s'invite à la remise de diplômes de grandes écoles, ni des fractures multiples entre les Français, assommés par deux ans de crise sanitaire, et qui viennent de composer une Assemblée nationale sans majorité.  Et voici que le premier geste politique d'Aurore Bergé, tout juste élue présidente du groupe Renaissance, est de proposer l'inscription du droit à l'avortement dans la constitution. Geste inutile et dangereux, mauvais message à la Nation.

Notons tout d'abord que la modification de la Constitution est un processus long et coûteux en organisation et temps des débats. A une période ou, au contraire, l'énergie des députés doit se déployer pour aider la France à reprendre en main son destin, voilà que l'on lui impose une charge supplémentaire. Il serait bien naïf de croire que l'on pourrait modifier la Constitution sur ce seul point précis. La Constitution est avant tout le code de fonctionnement de nos institutions, non pas la source suprême de droit. Le préambule mentionne trois textes de principes fondamentaux, ce qui est déjà beaucoup. Pour être pertinent du point de vue constitutionnel, l'insertion du droit à l'avortement devrait faire l'objet d'un texte d'une portée plus étendue. Nul doute que les questions sur la procréation d'inviteraient dans le débat. Et qu'un référendum serait exigé. 

Or, du point de vue pratique, l'inscription de l'avortement dans la Constitution n'apportera rien aux femmes désireuses d'une IVG. Les institutions pratiquant l'IVG ne s'ouvriront pas toutes seules, les personnels ne seront pas plus disponibles, les opposants ne se tairont pas, je crois même qu'au contraire ils parleront plus fort. Mais pendant ce temps, l'inflation aura galopé, l'énergie se fera plus rare, les élèves attendront leurs professeurs. Bref on pourra apprécier le travail de l'Assemblée en réponse à la situation des Français. Bref, les députés vont débattre sur les symboles plutôt que de combattre pour la nation.

Peut-être faut-il un débat aussi inutile pour qu'enfin se révèlent les forces politiques que les Français ont installées (ou laissé installer) au parlement. Cela provoquera-t-il un salutaire sursaut ? 

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